Être indemnisé en tant que victime d’infraction pour un accident de travail ?

Les victimes d’accident du travail peuvent saisir la Commission d’indemnisation des victimes d’infractions (CIVI) et être indemnisées par le fonds de garantie des victimes d’infractions, à certaines conditions. Ainsi l’a précisé la 2e Chambre civile de la Cour de cassation du 5 février 2015 (n°13-11945). Il s’agit d’une décision fidèle à la lettre et à l’esprit du code de procédure pénale et du code de la sécurité sociale, et qui confirme une jurisprudence établie.

Les faits : Monsieur X. employé en intérim, fait une chute dans les escaliers au cours d’une livraison chez un client de la société pour laquelle il était mis à disposition.
La procédure : Monsieur X. saisit la Commission d’indemnisation des victimes d’infractions, en invoquant un manquement du client aux règles de la sécurité.
Pour la cour d’appel, l’accident devait être qualifié d’accident du travail et les dispositions propres au « recours en indemnité ouvert à certaines victimes de dommages résultant d’une infraction ».
La Cour de cassation ne l’entend pas ainsi et casse cet arrêt en précisant que
« les dispositions propres à l’indemnisation des victimes d’infractions sont applicables aux victimes d’un accident du travail imputable à la faute d’un tiers ».

Il convient en effet de lire l’article L. 454-1 du code de la sécurité sociale (situé dans le chapitre 4 « Faute d’un tiers »), qui était visé dans le mémoire de l’avocat aux conseils de Mr X… :

« Si la lésion dont est atteint l’assuré social est imputable à une personne autre que l’employeur ou ses préposés, la victime ou ses ayants droit conserve contre l’auteur de l’accident le droit de demander la réparation du préjudice causé conformément aux règles de droit commun dans la mesure où ce préjudice n’est pas réparé par application du présent livre ».

Il en découle que les dispositions relatives à l’indemnisation des victimes d’infraction sont applicables aux victimes d‘un accident du travail imputable à une personne autre que l’employeur ou ses préposés.

Que disent les dispositions relatives à l’indemnisation des victimes d’infraction (article 706-3 du code de procédure pénale) ?

« Toute personne ayant subi un préjudice résultant de faits volontaires ou non qui présentent le caractère matériel d’une infraction peut obtenir la réparation intégrale des dommages qui résultent des atteintes à la personne, lorsque sont réunies les conditions suivantes :
1° Ces atteintes n’entrent pas dans le champ d’application de l’article 53 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (n° 2000-1257 du 23 décembre 2000) ni de l’article L. 126-1 du code des assurances ni du chapitre Ier de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation et n’ont pas pour origine un acte de chasse ou de destruction des animaux nuisibles ;
2° Ces faits :
– soit ont entraîné la mort, une incapacité permanente ou une incapacité totale de travail personnel égale ou supérieure à un mois ;
– soit sont prévus et réprimés par les articles 222-22 à 222-30, 224-1 A à 224-1 C, 225-4-1 à 225-4-5, 225-14-1 et 225-14-2 et 227-25 à 227-27 du code pénal ;
3° La personne lésée est de nationalité française ou les faits ont été commis sur le territoire national.
La réparation peut être refusée ou son montant réduit à raison de la faute de la victime. »

En l’espèce, les conditions susvisées aux articles 706-3 du code de procédure pénale et L. 454-1 du code de la sécurité sociale sont remplies, car :

  • Monsieur X. s’est blessé gravement dans les locaux d’une entreprise cliente de la société chez qui il était employé en intérim
  • une infraction aux règles de sécurité et de santé au travail a été retenue à l’encontre de cette société cliente de la société utilisatrice
  • l’auteur de l’infraction n’est ni l’employeur ni un préposé.